Entrevue avec Philippe Légaré, incendie 1910
Collection : Mémoire d’une époque, Ministère des Affaires culturelles, Archives nationales du Québec.
Entrevue avec Philippe Légaré, meunier de Saint-Eustache (à droite sur la photo).
Interviewée par Hélène Lamarre.
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Philippe Légaré : Il l’a jeté dans le trou et ça l’a tombé dans le papier. Il ventait fort et ça l’a attisé le feu. C’était un type qui revenait de la grande messe qui a ouvert la porte et qui a dit à Popa : Monsieur Légaré, le feu est pris dans vos bâtiments. Alors le mon’oncle André est rentré et a dit c’est moi qui a mis le feu… Alors il n’était pas question de parler, il fallait courir pour aller sauver le cochon, mais on n’a pas pu rien sauver. Le vent était assez fort que les planches qui étaient en feu, le vent les a projetés de partout. Nous n’avions pas les pompiers d’aujourd’hui. Nous avions qu’une petite pompe à bras, pi il n’y avait pas personne pour contrôler ça. Les gars étaient tous fous ! Le feu de courage, plus fort qu’eux autres!
Hélène Lamarre : Combien il y eut de maisons de brûlées ?
Philippe Légaré : Douze maisons pleine grandeur. La prison 37 qu’on appelait dans le temps, qui était de l’autre côté. Le magasin Champagne qui était voisin. Renaud, le maire du temps, le temple protestant, la Petite église, ça l’a brûlée. Le forgeron qui était voisin, un vendeur de grain et de foin, un boulanger et Broulle, un roturier. Le père y brûlait l’automobile au milieu de la rue Saint-Eustache. Et de ce côté-ci, il [le feu] a brûlé Monsieur Miller, Monsieur Rochon, Monsieur Paquette, Monsieur Bourrette-Chartrand. Après ça le vent a pris le bois en brasier et a charrié ça sur une grange qui était en arrière de tout cela. Une grange et une maison ont été brûlées là. Il a tout perdu son bois, perdu son cheval, perdu sa vache, ses poules, ses cochons. Il avait quatre cochons, je pense. Tout a brûlé ! Popa n’a pas pu rien sauver tant qui ventait fort.