Une entrevue avec Douglas Snair
La vignette de la galerie est reproduite avec l’autorisation de Bruce Deachman, The Ottawa Citizen.
Douglas Snair a partagé ses souvenirs de l’accident d’Almonte avec Ed Muldoon, autre survivant de l’accident et bénévole pour la Société historique de North Lanark. L’entrevue a eu lieu le 2 avril 2014, chez Douglas Snair dans le cadre du projet Paving the Way to Sustainability (ouvrir la voie vers la durabilité), un projet financé par la Fondation Trillium de l’Ontario dans le but de tisser des liens durables entre la communauté de Mississippi Mills et le Musée régional de North Lanark.
Douglas Snair, un homme âgé, assis dans un fauteuil inclinable en cuir brun; Ed Muldoon est assis à droite, hors champ.
Douglas : « J’avais passé Noël à Renfrew avec ma petite amie de l’époque et nous repartions en train. Nous nous étions arrêtés à la gare d’Almonte. Puis, bien sûr, le train militaire est arrivé et s’est écrasé contre l’arrière du train. »
Ed : « (hors champ) Dans laquelle des trois voitures vous trouviez-vous? »
Douglas : « Nous étions du côté de la locomotive. Nous avons eu de la chance. Les deux autres voitures ont été complètement démolies. »
Ed : « (hors champ) Donc vous étiez dans la troisième voiture? »
Douglas : « Nous venions d’arriver au fond de notre voiture lorsque, sous l’effet de l’impact (il fait un mouvement circulaire avec sa main), nous avons été soulevés du sol, percutant le banc devant nous. Je me suis levé et j’ai regardé vers l’avant, et ceci est la première chose que j’ai vue (il décrit une forme ronde avec ses mains d’environ 30 cm de diamètre) : le gros phare jaune de la locomotive et le devant de la locomotive fonçant dans notre voiture. La locomotive s’est arrêtée juste là. Nous avons eu beaucoup de chance. »
Ed : « C’était une locomotive plus grosse que celle qui tirait notre train. Nous aussi, nous étions dans la troisième voiture. »
Douglas : « (il interrompt Ed Muldoon) Oh oui, c’était une grosse locomotive continentale. »
Ed : « 2800 ouais… je me rappelle ce phare. J’étais dans la même voiture (la caméra se tourne vers Ed Muldoon, un homme âgé assis sur une chaise inclinable grise). Nous avons été projetés jusqu’à l’autre bout de la voiture et ensevelis sous les débris. Nous sommes restés sous les décombres pendant environ cinq heures avant qu’ils nous sortent de là. Une autre dame à Renfrew se souvient de ce phare : il n’était même pas cassé. C’était comme s’il n’y avait jamais eu d’accident. La lentille n’était même pas cassée; rien n’y paraissait. »
Douglas : « (la caméra se tourne vers Douglas Snair) Nous sommes sortis de l’accident indemnes. La vitre de ma montre a été brisée, c’est tout. Ensuite, notre chute a été assez bien amortie par le banc avant. Nous l’avons frappé (gestes de ses mains poussant vers l’avant) et je pense que… si je me souviens bien, il s’est brisé. Les gens devant nous se trouvaient en dessous. Alors, nous nous sommes levés et avons vérifié. Personne n’était blessé par chance. Eh bien, la prochaine chose à faire était de sortir de là. J’ai conduit ma petite amie sur le quai et je suis retourné voir ce qui se passait. J’espérais pouvoir aider d’autres personnes. Il y avait des blessés dans la voiture. Je pouvais entendre des gens appeler. Les supports à bagages étaient tombés et avaient frappé certains passagers. Mais je ne sais pas s’ils étaient gravement blessés. Je n’ai pas essayé de les aider parce que je craignais d’aggraver leur situation. »
Ed : « Nous étions coincés sous un tas de bancs (la caméra revient sur Ed Muldoon) et d’autres objets et nous ne pouvions pas bouger. Nous avions peur de bouger par crainte de perdre du sang. On ne pouvait pas savoir. Nous avons attendu quatre heures avant qu’ils nous sortent de là. »
Douglas : « C’est vrai? »
Ed : « Ouais. »
Douglas : « Nous avons été chanceux (la caméra revient à Douglas Snair), car nous étions tous les deux sortis de là en l’espace de 15 à 20 minutes. »
« Ça a dû être une scène effroyable lorsque vous êtes sorti de là et que vous avez vu tous ces débris et tout le reste. »
Douglas : « Eh bien, je ne me rendais pas compte à ce moment-là que la locomotive… avait embouti trois voitures avant qu’elle nous frappe, ou plutôt deux voitures. Ce n’est qu’une fois être sorti sur le quai et être retourné pour voir ce qui se passait que j’ai vu tous les débris et les gens étendus sur le sol. C’était horrible à voir. »
Ed : « Nous n’avons pas vu ça parce que nous ne pouvions pas sortir. Alors, je suis vraiment content de ne pas avoir vu la scène, eh oui. »
Douglas : « Oh, c’était terrible… les pleurs, les cris, ce genre de choses. Je ne l’oublierai jamais. »