La fin d’une époque : le Dorothy (1936)
La piste d’atterrissage de Harbour Grace accueille son dernier aviateur transatlantique le mercredi 28 octobre 1936.
James (Jim) Mollison, pilote écossais et pionnier de l’aviation, y a atterri aux commandes de son monoplan Bellanca orange et vert appelé Dorothy. Ce nom viendrait de la nouvelle conquête amoureuse du pilote, l’actrice Dorothy Ward.
La carrière de Mollison débute en 1923 avec l’entrée de l’aviateur dans la Royal Air Force britannique. À 18 ans, Mollison était alors le plus jeune officier du service.
Il devient par la suite pilote commercial en Australie, où il fait la rencontre de celle qui deviendra son épouse, Amy Johnson, elle-même aviatrice accomplie. Le couple, que les médias surnomment « les amoureux volants », se marie peu de temps après s’être rencontré.
Ayant déjà plusieurs records de vitesse à son actif, Mollison vise alors à devenir le dernier aviateur à battre le record de vitesse des vols transatlantiques. Peu avant 17 h le 28 octobre, le Dorothy est aperçu au-dessus de la piste d’atterrissage de Harbour Grace.
Cependant, son arrivée se révèle difficile. L’avion frôle accidentellement Crow Hill durant sa descente, et seule l’habileté du pilote à manœuvrer sur une seule roue permet un atterrissage en toute sécurité.
Après avoir étudié les rapports météorologiques, Mollison décide de rester à Harbour Grace jusqu’au lendemain. On organise alors le ravitaillement en carburant du Dorothy et Mollison passe la nuit à Cochrane House.
L’après-midi suivant, à 17 h 10, Mollison décolle en direction de Londres. Bien que la météo soit clémente à Harbour Grace, le pilote doit affronter une tempête au-dessus de l’Atlantique durant laquelle les ailes de son avion gèlent. Volant en moyenne à 160 milles à l’heure, l’avion atterrit à l’aéroport de Croydon le 30 octobre, à 6 h 27, heure de Terre-Neuve.
Avec ce vol, Mollison fracasse tous les records de vitesse vers l’est, devenant la trente-deuxième personne à traverser l’Atlantique en avion et la première personne à effectuer un vol jusqu’à Londres sans atterrissage forcé en cours de route.
Malgré ce record, seule une poignée de spectateurs assiste à l’atterrissage du Dorothy. Cette réaction décevante illustre bien l’état d’esprit de l’époque.
En d’autres termes, les exploits de l’aviation transatlantique ne suscitent plus l’admiration. Le vol du Dorothy marque ainsi la fin d’une époque pour la piste d’atterrissage de Harbour Grace. Mollison deviendra le dernier aviateur transatlantique à être accueilli sur le site.