Mifflin Wistar Gibbs : Il a fait beaucoup de grandes choses
Dans son autobiographie publiée en 1902, Mifflin Gibbs décrit son arrivée à Victoria en 1858 : « Nous avons reçu un accueil chaleureux de la part du gouverneur. Nous n’avions rien à dire sur le mécénat d’entreprise existant dans l’État de Californie, mais étions découragés de savoir que, si notre existence était tolérée, nous étions impuissants à faire appel à la loi pour notre protection ou celle de nos biens. La Colombie-Britannique offrait et accordait cette double protection ainsi que l’égalité des privilèges politiques. Je ne peux décrire avec quelle joie nous avons salué la chance de jouir de cette liberté sous l’œil du ‘Lion britannique’, qui nous a été refusée sous les ailes déployées de l’aigle américain ».
Gibbs devient le leader de facto de la communauté noire de l’île de Vancouver. Brillant en affaires, il fonde et exploite l’entreprise Lester & Gibbs avec son partenaire Peter Lester. Cette entreprise aurait été la rivale de la Compagnie de la Baie d’Hudson. Il possède des biens et ses cinq enfants naissent ici.
En 1866, Gibbs devient le premier Noir à être élu à un poste public. Il agit comme conseiller municipal de Victoria pour le district de la baie James. En 1868, il est nommé délégué pour représenter l’île Saltspring à la Conférence de Yale visant à établir les conditions d’entrée de la colonie dans la Confédération.
À l’automne 1868, il est réélu au conseil municipal, puis une autre fois en 1869, mais il interrompt son mandat pour diriger un projet d’extraction de charbon dans l’archipel Haida Gwaii (anciennement îles de la Reine-Charlotte) où il fabrique le premier tramway de Colombie-Britannique pour livrer le charbon jusqu’aux voies maritimes.
C’est à cette époque que sa femme Maria et ses enfants retournent aux États-Unis. Dans son autobiographie, Gibbs écrit : « J’ai eu une femme modèle dans tous les sens du terme, mais elle a eu un mari nomade et indécis ».
Gibbs retourne aux États-Unis à la fin de 1870. La colonie est plongée dans des luttes politiques, administratives et financières devant la perspective d’entrée de la colonie dans la Confédération. Gibbs décrit le gouvernement colonial britannique comme « inadapté à une communauté intelligente du 19e siècle ». Il était lui-même un aventurier et un homme téméraire, toujours à la recherche de nouveaux défis. Peut-être voyait-il dans l’ère de la reconstruction des États-Unis des meilleures perspectives de succès.
Aux États-Unis, il fait carrière en droit et devient le premier juge municipal noir à être élu aux États-Unis. En 1897, il est nommé par le président McKinley comme consul des États-Unis à Madagascar. Le 31 août 1907, il revient à Victoria. Un article mentionne : « Il a été à la fois surpris et ravi de l’apparence de la ville, mais a déclaré qu’il voyait dans un avenir rapproché des choses bien plus importantes pour Victoria ».
À sa mort à l’âge de 92 ans à Little Rock en Arkansas, l’Arkansas Gazette publie un récit complet de sa vie. Le dernier paragraphe soulignait : « Ses qualités de leader pendant des années auprès de son peuple et comme représentant dans les domaines politique, financier et social lui ont fait gagner la confiance des deux races ».
Le 4 août 2009, le gouvernement du Canada a reconnu Gibbs comme « un personnage d’importance historique nationale ». Une plaque commémorative est visible dans le parc Irving, à Victoria en C.-B. à l’endroit où Gibbs vivait.
Ron Nicholson, membre de longue date de la BC Black History Awareness Society, parle des réalisations et accomplissements nombreux de Gibbs, le décrivant comme son héros. L’interview a lieu dans la salle communautaire Mifflin Wistar Gibbs située dans la succursale de la bibliothèque James Bay sxʷeŋ’xʷəŋ taŋ’exw à Victoria, C.-B. Cette salle a été dédiée à Gibbs en mai 2018.
Le titre de ce récit se trouve à la dernière ligne du discours prononcé par Ron Nicholson, directeur de la BC Black History Awareness Society, lors de la cérémonie de dévoilement de la plaque, le 4 mai 2019. Le texte est tiré de la biographie de Gibb. Celui-ci s’entretient avec Julia Griffith, une abolitionniste blanche d’origine anglaise qui travaillait comme directrice commerciale de Douglass, après une tournée particulièrement éprouvante avec ce dernier. Gibbs écrit : « Je n’oublierai jamais sa réponse… on voyait déjà toute la grandeur de son idéal… ‘Quoi ! Découragé ? Va et accomplis de grandes choses’ »;
Mifflin Gibbs, « Shadow and Light: An Autobiography » (Ombre et lumière, une autobiographie), Washington, D.C., 1901;
Crawford Kilian, « Go Do Some Great Thing: The Black Pioneers of British Columbia » (Va et accomplis de grandes choses : les Pionniers noirs de la Colombie-Britannique), Commodore Books, 2008.