Georgianna Jaques
« Chloe Russel, une femme de couleur de l’État du Massachusetts, communément appelée la vieille sorcière ou l’interprète noire », The Complete Fortune Teller and Dream Book, 1827.
Gracieuseté de l’Early Black Boston Digital Almanac, Northeastern University, Boston (Massachusetts), 2022.
«
…si vous rêvez que vous êtes en compagnie d’un jeune homme, dont la personne et la conversation vous plaisent, vous pouvez être sûre que vous deviendrez un jour la femme d’un compagnon agréable…
»
–
Chloe Russel, Exeter (Massachusetts), 1824
Georgianna (Georgia) Jaques (née vers 1807 et décédée après 1884) était une diseuse de bonne aventure qui, en 1871, offrait un service précieux aux citoyens de Fredericton. Son entreprise était répertoriée dans l’annuaire Lovel (Lovel Directory) de Fredericton de 1871 comme étant située sur la rue Regent. Née au Nouveau-Brunswick vers 1807, Georgianna était la veuve de Richard Jaques (Jacques). En 1871, elle était la seule diseuse de bonne aventure de la ville à faire de la publicité pour ses services, même si d’autres personnes d’origine africaine de la région possédaient également la capacité de prédire l’avenir. À titre d’exemple, le souvenir évoqué d’un membre de la famille Wheary demeurant près de Mouth of Keswick et qui avait le « don » de la « seconde vue », ainsi que la capacité de communiquer par télépathie avec d’autres personnes au-delà des distances géographiques. On dit aussi que le grand incendie de Fredericton de 1850 a été prédit par un membre de la communauté noire de la ville.
La divination était une faculté particulière qui se transmettait de génération en génération chez les Africains. Bien qu’ils aient été arrachés à leur terre natale par la traite transatlantique des esclaves, les Africains asservis ont trouvé des moyens de maintenir leurs traditions culturelles. Ainsi, même si des propriétaires d’esclaves comme Caleb Jones à Nashwaaksis ou George Harding à Maugerville ont essayé de les dépouiller de leur culture et de leur religion, les traditions africaines n’en ont pas moins été préservées –
transmises de mère en fille ou de père en fils – grâce aux dons de voyance et de prédiction.
L’une de ces méthodes de prédiction figure dans la publication de 1827, The Complete Fortune Teller and Dream Book, écrite par Chloe Russel, une «
personne de couleur
» qui vivait au Massachusetts. Comme Georgianna, Chloe Russel était douée de la capacité de prédire l’avenir et connaissait bien les techniques de «
l’astrologie, de la physiognomonie et de la chiromancie
» :
«
Méthode permettant à une jeune femme
de savoir si elle se mariera un jour
»
«
À la pleine lune, écrivez le nom de n’importe quel homme sur un morceau de papier propre, pliez-le en forme de cœur, versez-vous un canon de vin rouge et trempez-le dedans, puis buvez le vin en trois fois au moment de vous coucher, mettez le papier sous votre oreiller et pensez au mariage jusqu’à ce que vous vous endormiez. Si vous rêvez que vous êtes en compagnie d’un jeune homme dont la personne et la conversation vous plaisent, vous pouvez être sûre que vous deviendrez un jour la femme d’un compagnon agréable. Mais si vous rêvez que l’apparence et la conversation du jeune homme vous dégoûtent, vous pouvez affirmer sans risque que vous mourrez vieille fille.
»
En 1881, Georgianna Jacques avait abandonné son commerce et résidait désormais à l’hospice de Fredericton (foyer pour les personnes ayant besoin d’un endroit où vivre). Elle n’y est pas restée très longtemps car dès 1884, le registre des invités précise que «
Mme Jaques… est partie à Philadelphie, en Pennsylvanie.
» La même année, son nom inscrit dans l’annuaire de la ville de Philadelphie, indique qu’elle demeure au 930, rue Locust. L’histoire de Georgianna nous rappelle les liens étroits avec la culture africaine qui existaient à Fredericton, culture transmise de mère à enfant.