Couper le foin du marais
Audio : Écrit par Ian Forsyth, 1995, lu par Ray Adams, 2018. Paru en annexe à « La vie et l’époque de Peter Max Kuhn 1887 – 1938 » écrit par Bernard Kuhn et imprimé en 1995. Également paru dans l’édition de printemps 2010 du bulletin de la Cole Harbour Rural Heritage Society.
Image: [19-?]. Album d’Ira Settle. Archives de la Cole Harbour Rural Heritage Society.
Transcription:
Bernard Kuhn demanda à Monsieur Forsyth d’écrire un article sur son travail d’été à la ferme de Peter McNab Kuhn à Upper Lawrencetown pour le joindre à l’œuvre de Kuhn « La vie et l’époque de Peter Max Kuhn », 1887 – 1938.
Un matin, Max m’a dit: « Nous allons couper du foin des marais aujourd’hui ». « Foin des marais » était une nouvelle expression pour moi. Je connaissais le foin des hautes terres, principalement la fléole des prés et les herbes brunes, mais qu’était donc « le foin des marais »? Max attela le cheval au char à foin, fixa le râteau et la tondeuse derrière, puis me fit signe de monter à bord. L’endroit où nous devions nous rendre était apparemment à quelques kilomètres de là, mais toujours sur les terres de la ferme. Nous avons emprunté un chemin étroit, rocailleux et peu utilisé. Vers le tiers du chemin, nous sommes arrivés à ce que je ne peux qualifier que de bourbier. C’était une dépression remplie de boue, d’écume et d’eau sale. Le tas de foin s’est enfoncé de façon alarmante, les chevaux ont trébuché et traversé maladroitement le trou d’eau. Nous avons affronté deux autres obstacles semblables, puis nous en avons découvert un autre encore plus grand, le rivage de l’océan. J’étais certain que Max allait s’arrêter ici, mais non : les chevaux se sont dirigés vers la mer comme de vieux marins, encouragés et dirigés par Max. Le chariot s’enfonça de plus en plus profondément et je dus grimper sur le foin pour me mettre en sécurité. À mon grand soulagement, nous avons commencé à remonter et sommes finalement arrivés sur une île, où nous allions récolter le foin des marais. Max détela les chevaux du char à foin et les attela à la tondeuse pendant que je tentais de me repérer. Comme la saison était avancée, le foin du marais mettait peu de temps à sécher. Nous commencions à avoir faim; nous avons donc cessé de ratisser pour déguster notre repas. Après avoir terminé, nous nous sommes regardés et nos yeux disaient la même chose. Même si nous avions apprécié notre dîner, nous aurions mangé davantage. Je devais encore être en pleine croissance parce que j’avais un appétit vorace.
Nous nous sommes retroussé les manches et avons commencé à charger le foin. C’est alors que j’ai découvert la véritable nature du foin des marais. C’était un type de fourrage sournois dont il fallait se méfier. Dès que vous pensiez que le foin était bien empilé et que vous vous retourniez pour en ramasser d’autre avec votre fourche, vous entendiez un bruissement derrière vous. En regardant derrière vous, vous aperceviez alors de grandes quantités de foin glissant sur le sol. Le foin des marais est effectivement différent des variétés de foin que l’on retrouve dans les hautes terres. Sa surface est plus lisse et n’a pas cette légère rugosité qui garde la fléole des prés et la variété d’herbes brunes ensemble. Il est effrontément trompeur. Même les chevaux ne l’aimaient pas beaucoup. En prononçant quelques gros mots, Max et moi fîmes une autre pile de foin, en prenant soin de bien rentrer tous les brins. Une fois la pile complétée, nous avons mis le poteau d’amarrage en place et l’avons solidement attaché. Nous avons refait le long trajet jusqu’à la maison et affronté les mêmes dangers, qui étaient devenus moins redoutables.
(Image : Coupe de foin sur la digue de Cole Harbour, avec Jack Settle assis sur une tondeuse tirée par un cheval.)