Une communauté en croissance
Au début du 19e siècle, le marais salé de Cole Harbour demeurait toutefois un centre d’intérêt important pour de nombreux résidents. Bien que le commerce avec Halifax se soit développé, l’accès à la ville demeurait un problème. Outre le fait d’avoir à traverser ou contourner le marais, certains regardaient sa vaste étendue et y voyaient des champs de foin et du bétail engraissé comme l’on en trouvait de l’autre côté de la province, sur les terres endiguées de la baie de Fundy. Les maraîchers qui cultivaient des choux et des navets imaginaient des rangs alignés sur des terres riches et faciles à cultiver. Ceux qui pêchaient dans le marais salé ou à l’embouchure de l’Atlantique, ou qui profitaient de l’abondance de gibier et d’oiseaux sauvages autour de l’estuaire, le préféraient tel qu’il était.
Toutefois, Cole Harbour était une communauté composée principalement d’agriculteurs qui se souciaient peu de la nature sauvage et considéraient toute terre non cultivée comme une terre gaspillée. Même s’ils appréciaient la grande quantité d’algues qui s’échouaient régulièrement sur la plage et qu’ils utilisaient pour engraisser leurs champs, ou le foin salé qu’ils récoltaient autour du marais pour compléter le fourrage d’hiver, ils éprouvaient de plus en plus le besoin de tirer davantage parti des terres non utilisées autour du marais.
En 1842, la communauté commence à concrétiser ses rêves. Quelque 32 notables, principalement des agriculteurs représentant la majorité des patronymes connus de la région de Cole Harbour, proposent alors la création d’une société par actions dans le but d’endiguer le port et de transformer le marais en terres agricoles. Il fallut trois ans à la Cole Harbour Dyke Company pour devenir une entité juridique, avec comme signataires la moitié des personnes qui avaient assisté à la réunion initiale et quelques autres. Les efforts en vue d’endiguer le marais finirent par échouer. Des années plus tard, la mer emporta les quelques constructions qui avaient été entamées; les investisseurs acceptèrent leurs pertes et la vie du marais salé de Cole Harbour et de sa faune reprit son cours comme avant. Les deux marées quotidiennes continuaient de fournir des nutriments au marais et de l’enrichir, et de ramener à la mer une multitude de formes de vie éphémères, dont une abondance d’alevins et de jeunes poissons. Ne profitant plus de la sécurité de leur frayère, ils allaient devoir affronter les risques de poursuivre leur croissance en pleine mer. La première tentative de créer une digue a été décrite comme une entreprise courageuse, mais coûteuse, peu remarquée et aujourd’hui presque entièrement oubliée.