Le règne de l’essence, partie 1 (1920–1947)
La domination de la voiture à essence ne signifie pas la fin immédiate de la voiture électrique en tant que concept. Les véhicules électriques vont subsister sous une forme ou une autre pendant le demi-siècle suivant, mais sans jamais être à l’avant-garde de l’automobile. En Amérique du Nord, la Detroit Electric est le dernier grand fabricant de véhicules électriques à cesser la production de voitures particulières et, jusqu’en 1942, elle vend des modèles électriques anciens remis à neuf avec de nouvelles carrosseries.
Les véhicules industriels – tels que les chariots élévateurs à fourche, les camions d’exploitation minière et les chariots de livraison sur courte distance – constituent la grande majorité des véhicules électriques encore en service pendant ce demi-siècle de domination de l’essence. Par exemple, l’Angleterre commence à développer un important parc de camionnettes électriques pour la livraison de lait, les « milk floats », mais celles-ci n’ont jamais été conçues comme des véhicules particuliers. Les véhicules électriques trouvent leur place dans différents contextes : par exemple, le véhicule doit fonctionner sans combustion ou tracter des charges extrêmement lourdes, ou bien il doit être utilisé à l’intérieur d’une usine où il peut être constamment rechargé. Les quelques véhicules électriques particuliers mis au point au cours de cette période sont vraiment remarquables, mais aucun n’est d’origine canadienne.
Le rationnement accélère le retour à l’électrique
La montée des tensions et le déclenchement de la guerre en Europe en 1939 sont à l’origine d’une légère résurgence du marché des véhicules électriques dans le monde. Avec le rationnement de l’essence et la destruction des voies d’approvisionnement en pièces de moteur et en pneus, les petites voitures électriques à faible autonomie retrouvent soudainement une utilité pratique.
Taxis électriques David conduits et rechargés à Barcelone, en Espagne, vers 1939. (Sous-titrage disponible en anglais et en français) Regardez cette vidéo avec une transcription en français.
À la fin de la Guerre d’Espagne en 1939, l’économie de l’Espagne est dévastée. Les importations de pétrole étant sévèrement restreintes, plusieurs entreprises automobiles, dont David de Barcelone, transforment pendant plusieurs années des Opel et des Citroën importées en taxis électriques. Dans la France occupée, la possession de voitures à essence est restreinte. Ce qui incite Peugeot à construire 377 voitures électriques VLV à deux places entre 1942 et 1945, bien que les forces allemandes empêchent la poursuite de la production du véhicule.
Après la guerre, le marché japonais des voitures électriques est en plein essor, car le gouvernement japonais nouvellement formé encourage les fabricants locaux à construire des voitures électriques bon marché en réponse au rationnement de l’essence et des pièces de moteur. L’une des plus célèbres voitures est la Tama, construite en 1947 par la Tokyo Electric Automobile Co., qui fusionnera par la suite avec d’autres sociétés pour devenir Nissan.
Les « hybrides » allemands en temps de guerre
L’Allemagne arrive en tête dans le domaine des véhicules hybrides, bien que d’une façon inattendue. Ferdinand Porsche poursuit ses travaux sur la propulsion hybride essence-électricité avec pour résultat la production de 91 modèles du Sd.Kfz. 184 Elefant, un canon antichar automoteur de 65 tonnes, utilisé notamment lors de la bataille de Koursk en 1944. Porsche utilisera un système de propulsion hybride similaire dans les deux prototypes du Maus de 190 tonnes, le char le plus lourd jamais construit.
Après la Seconde Guerre mondiale, avec la fin du rationnement et le retour à la normale des échanges commerciaux, les voitures à essence reviennent sur les routes tandis que les voitures électriques sont reléguées dans l’ombre. Mais le concept ne disparaît pas totalement. Dans les années 1950 et 1960, les développements technologiques de la conquête spatiale suscitent un nouvel intérêt pour le transport électrique.