Le talonnage et la finition
Entrevue réalisée par Monique Provost-Chatigny
Montage par Gabriel Laprade
Tout en se balançant vigoureusement sur son fauteuil berçant brun et en accompagnant de gestes ses explications, Marcel Charron nous parle de certaines étapes de la fabrication d’une chaussure.
Transcription:
C’est Alexis qui était le talonneur. Il était sur une machine. Pis cette machine-là, elle prenait le soulier sur la forme en bois et il revirait la chaussure à l’envers. Moi, quand j’étais ti-gars, quand je suis sorti du « fittage », je suis allé travailler avec Alexis Letendre. Moi je collais les talons en cuir pis un rubber (pièce de caoutchouc). Je mettais le rubber par-dessus le cuir comme les talons d’aujourd’hui. Le haut est en cuir et le bas en rubber, pour pas tomber. Lui il mettait le talon là et il y avait un autre gars qui travaillait avec lui, c’était Gilles Perreault dans le temps. Ils l’appelaient Credo celui-là. Lui, il mettait des clous dans une « patente » et quand la « patente » était pleine de clous, il la poussait. Les clous descendaient et là mon Letendre plaçait le talon et il pesait sur une pédale. Les drivers, y’appelaient ça les drivers, comme des « pines », ça descendaient dans le métal et ça clouaient le talon. Là, il talonnait, il talonnait, tout dépendant de la sorte de souliers.
Après que ça c’était fait, c’était pas tout. Là, fallait qui soit, comment y’appelaient ça eux autres. Ils trimaient (taillaient) le talon pour que tout soit beau, parce qu’il était large et gros. Il y avait une machine avec des couteaux qui tournaient. Comment y’appelaient ça. Pis là, le tour de la semelle, pareil. Ces gars-là qui faisaient ça, c’étaient les vieux, les gars de métier. Y prenaient les couteaux. C’était des couteaux qui tournaient à peut-être deux ou trois mille tours. Ça coupait, il fallait pas qu’un gars se mette les doigts là ! Pis là, c’était lui qui donnait la forme au soulier pour tout égaliser la semelle. Parce que la semelle, elle était bien plus large, après avoir cousu ça dépassait. Il fallait pas donner un coup pour couper la couture.
Quand le soulier était passé là, il descendait au père Houle. C’est le père Houle qui l’avait le dernier pour (le) nettoyer s’il y avait de la colle. Le polissage final se faisait sur l’étage du bureau. Quand ça partait de là, ça s’en allait en bas sur l’étage du bureau. Ils appelaient ça des treasers. Ils avaient des fers chauds et ils passaient ça sur le cuir parce que parfois il y avait des plis, ça avait été cousu.