Récit de Dinah Shashaweskum
Entrevue enregistrée à Wemindji, QC
Photo : Dinah (à gauche) et sa sœur Rita à Wemindji, 2018, Collection du département du bien-être et de la culture de Wemindji
Oui, une fois, je me souviens, le territoire de piégeage [territoire de chasse familial], celui de mon père, était très loin, même plus loin que Sakami [Sakami est un très grand lac], de l’autre côté. On y allait, ou on partait à pied, on voyageait en marchant pour que l’avion ne soit pas obligé de monter jusque-là. C’est à Sakami que l’avion arrivait, puis on marchait plus loin à l’intérieur du territoire. Je pense qu’on marchait deux ou trois jours à partir de l’endroit où l’avion nous avait laissés.
Je me souviens d’avoir créé un campement en cours de route. Il n’y avait pas de camps ni d’habitation, on installait un campement même si c’était juste pour une nuit ou deux. Et les gens chassaient en route. Si on n’avait pas assez de nourriture, on installait un filet de pêche le soir pendant une ou deux nuits pour avoir quelque chose à manger le lendemain ou pendant le voyage. Et on mettait des pièges à lapins, et des pièges à perdrix. En route, on n’avait pas beaucoup de nourriture achetée, seulement de la farine pour le bannock, de la poudre à pâte, du lard, du sucre, du thé et du lait pour les enfants, du lait en poudre.
Je me souviens quand on voyageait cette fois-là, on avait fait presque tout le chemin à pied. Quelques-uns, mon frère et les hommes plus jeunes partaient en avant [parce qu’ils étaient plus rapides] et commençaient à construire l’abri pour la nuit, un tipi. Il n’était pas grand, juste assez grand pour que tout le monde puisse dormir. Donc, ils ont commencé à construire le tipi avant qu’on arrive. Aussitôt qu’on est arrivés, on a commencé à aider à ramasser les branches d’épinette pour le plancher et le bois de chauffage.
Je me souviens qu’il faisait vraiment froid au coucher. On n’avait pas de gros matelas pour dormir. On avait des couvertures de plumes, on a utilisé ça et aussi des peaux d’ours pour se tenir au chaud. Et il faisait quand même très froid. On s’est couchés serrés l’un sur l’autre pour se tenir au chaud.
Je ne sais pas vraiment tout le chemin qu’on a fait cette fois-là. Je me souviens qu’un avion est arrivé plus tard sur le lac pour nous ramener [à Wemindji]. Juste les femmes et les enfants sont montés dans l’avion. Les hommes sont retournés à pied à Paint Hills. Ça, c’était une longue distance. Je voulais vous raconter cette histoire, je me souviendrai toujours de ce temps-là.