Bijoux et produits de luxe français : Antonio Joseph
Au cours des 110 dernières années, le bâtiment du 338, rue Water à St. John’s est resté remarquablement inchangé. Il est situé à l’entrée de l’actuel quartier des spectacles de la ville, à l’angle des rues Water et Adelaide. Il s’agit d’une structure en béton de trois étages, portant fièrement sur sa corniche l’inscription « A. Joseph & Son, erected 1912 » (A. Joseph et fils, construit en 1912).
Aujourd’hui, peu de gens connaissent l’identité du constructeur et propriétaire. Plus rares encore sont ceux qui devineraient qu’il s’agit d’un immigrant libanais. Dans son pays d’adoption, Terre-Neuve, il s’appelait Antonio Joseph, mais son nom de famille était inscrit comme « Chalate ». Antonio et sa femme, Marie Gaultois, ont été parmi les premiers membres de la communauté libanaise à venir à Terre-Neuve au milieu et à la fin des années 1880. Leur seul enfant, Dufie Joseph, est né en février 1892.
Le premier commerce d’Antonio se trouvait sur la rue New Gower, où il vendait « des lignes complètes de bijoux et de produits de luxe français ». Il voyageait souvent pour ses affaires. Homme d’affaires confiant, il était une personnalité haute en couleur au sein de la communauté libanaise de Terre-Neuve. Dans une lettre du 16 mai 1906 adressée au rédacteur en chef du Western Star, il prend la défense des immigrants libanais en ces termes :
Certains d’entre nous sont dans ce pays depuis dix-sept ans, et c’est grâce à notre courage et à notre persévérance que nous sommes parvenus aux positions que nous occupons aujourd’hui. Il est vrai que nous avons gagné de l’argent ici, mais nous ne l’avons pas gardé pour nous. Nous avons investi dans des exploitations minières, des puits de pétrole, des pêcheries, des exploitations forestières et bien d’autres entreprises coloniales.
Vers 1899, il déplace ses principales activités commerciales dans l’ouest de Terre-Neuve. À Humbermouth, où la ligne de chemin de fer de Terre-Neuve avait été achevée en 1895, il construit un grand hôtel, le « British North American Hotel », qui connut un grand succès. Il le dirige avec sa femme et son fils jusqu’à sa mort prématurée survenue le 31 mai 1913, à l’âge de 55 ans.
L’Evening Telegram rapporte qu’« il a été le pionnier de la colonie syrienne à Terre-Neuve et était un homme très connu et très respecté »
Comme le montre l’inscription sur l’immeuble du 338, rue Water, la construction de l’immeuble s’est achevée l’année précédant la mort d’Antonio. Le bâtiment constitue un héritage durable à son nom.