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Une histoire d’estivants dans Saint-Patrice

Image en noir et blanc d'un traversier à vapeur de taille moyenne en transit sur le fleuve, expulsant un nuage de fumée noire de sa cheminée, bondé de voyageurs sur son pont avant.

Navire à vapeur « Murray Bay » transportant des passagers sur le fleuve Saint-Laurent, photographe et date inconnus.

 

À l’époque, seules les élites commerciales et politiques des grandes métropoles canadiennes telles Ottawa, Montréal et Québec, pouvaient se permettre des séjours en famille durant la saison estivale. Certains résidaient dans des hôtels ou des maisons de pension de petites communautés côtières, d’autres aménageaient leur résidence en gîte ou louaient des chambres aux vacanciers.

Les terres riveraines longeant la rive sud du fleuve Saint-Laurent telles Cacouna et Rivière-du-Loup, facilement accessibles par bateau à vapeur ou par la voie ferroviaire, attiraient de nombreux vacanciers.

Situé à environ quatre kilomètres à l’ouest de Rivière-du-Loup, Saint-Patrice est une communauté offrant un environnement agréable, sain et naturel. Le fait que les deux premiers gouverneurs généraux et le premier Premier ministre du Canada y aient séjourné durant leurs vacances d’été a largement contribué à rehausser la réputation de cette région qui devint dès lors un lieu de villégiature très prisé.

Dans les années 1860 et 1870, les séjours en bord de mer et tout particulièrement, les bains de mer, étaient prescrits comme cures de santé à des patients souffrant de divers maux physiques.

Le premier résident de Saint-Patrice était un certain M. Lemoyne, un québécois descendant de la distinguée famille Le Moyne de France.

Joseph Chouinard, l’un des nombreux descendants de famille française ayant résidé à Saint-Jean-Port-Joli, fut le premier québécois à ouvrir une pension à Saint-Patrice où de nombreux aristocrates et politiciens ont séjourné.

Un portrait plan buste –peint à l’huile de James Coristine vêtu d'un veston de couleur noire et d’une chemise blanche couplée d’une cravate. Il pourrait être âgé entre 30 et 40 ans, sa chevelure noire séparée par une raie arborée de longs favoris. Son expression est calme, bien que son teint soit rougeâtre; il a un regard qui porte au loin, orienté vers la droite.

James Coristine (1837-1908), portrait de J.C. Forbes, 1881.

 

James Coristine, un homme d’affaires né en Irlande, émigré à Montréal et ayant développé un intérêt pour le commerce de fourrures, fut également l’un des premiers estivants du Saint-Patrice. Lui et sa femme, Emma Budden, eurent sept enfants. L’un de leurs petits-enfants, Robert William Coristine, épousa Elizabeth Symington, fille de Herbert James Symington et de Fay Christie.

 

Photo officielle en noir et blanc de trois personnes (William C. Meredith, son épouse, Sofia Naters Holmes Meredith et leur fils, Henry Meredith); le couple (âgé) assis sur des chaises richement sculptées et leur fils assis derrière eux sur un tabouret.

De gauche à droite : William Collis Meredith, son fils Henry Meredith et sa femme Sofia Naters Holmes Meredith.

 

Sir William Collis Meredith, juge en chef de la Cour supérieure du Québec, et sa femme Sofia Naters (Holmes) Meredith, étaient également très attirés par le Saint-Patrice. En 1866, ils achetèrent 1 400 acres de terres agricoles dans cette région et firent construire une maison communément appelée Rosecliff où ils séjournaient en famille durant les vacances estivales. Vingt ans plus tard, Sir William fit l’acquisition d’une seconde propriété (appelée Bella Rivière) construite pour son fils Edmund.

Le développeur ferroviaire Thomas Reynolds construisit un cottage de style Regency (au 304 rue Fraser) en 1868. Le gouverneur général Lord Dufferin et son épouse furent parmi les premiers à y séjourner durant l’été. La propriété fut plus tard achetée par James K. Ward, un négociant en bois de Montréal, membre du cabinet de Macdonald. Elle est aujourd’hui désignée sous le nom Rookwood.

En 1870, Sir John A. Macdonald fut conseillé par son médecin, le Dr Charles Tupper, de faire un séjour en bord de mer pour se refaire une santé.

Photographie officielle en noir et blanc d'un homme (Sir Charles Tupper) à la chevelure noire et aux longs favoris, vêtu d’un costume avec veste, en position assise, les mains posées sur ses cuisses. On peut voir bien visiblement la chaine d’une montre sortant de son veston. Ses sourcils froncés et les coins de sa bouche abaissés lui donnent un air grave.

Charles Tupper fut l’un des médecins traitant de Sir John A. Macdonald avant d’être nommé ministre dans son cabinet.

 

Durant les vacances d’été, les pères de familles estivantes (dont les Macdonald) devaient parfois faire des allers-retours en ville pour des raisons professionnelles, pendant que les femmes et les enfants demeuraient à leur cottage durant toute la saison estivale.

Les vacanciers qui n’avaient pas fait de réservations à « Saint-Patrice Inn » ou à la Pension Chouinard se voyaient offrir d’être hébergés chez certains résidents locaux qui louaient leur propre maison pour la saison estivale et installaient leur famille dans une cabane érigée ailleurs sur leur terre.

 

Photo noir et blanc d'un homme d'âge moyen (Sir Thomas McGreevy), partiellement chauve, assis sur une chaise capitonnée, son bras droit appuyé sur un secrétaire; son regard tourné vers la caméra. Il est vêtu d’un costume officiel sombre de style mi-victorien; un chapeau haut-de-forme repose à l'envers sur une autre chaise en velours capitonnée à ses côtés. En arrière-plan, des tentures suspendues dont une devant une porte.

Thomas McGreevy, photographié à Ottawa par James Topley, non daté.

 

Thomas McGreevy, banquier, entrepreneur et politicien né à Québec, l’un des Pères de la Confédération, séjourna également à Saint-Patrice avec son épouse et ses deux enfants. Lorsqu’il ne pouvait y passer l’été, il louait sa propriété (Sir John A. et Lady Macdonald ont d’ailleurs loué la villa de Thomas McGreevy durant l’été de 1882 pendant que leur villa Les Rochers faisait l’objet de travaux d’agrandissement).

Photographie noir et blanc d'un homme de grande taille (Kenneth Molson), souriant, tenant dans ses bras un enfant en bas âge, lui aussi souriant, posant à l'extérieur sur une pelouse devant une rangée d’arbres en arrière-plan.

Kenneth Molson avec sa plus jeune fille, Jane Beatrice Molson, à Saint-Patrice, vers 1924.

 

L’homme d’affaires montréalais Kenneth Molson, époux de Isobel Meredith, fit construire une résidence d’été à Saint-Patrice en 1920, à mi-chemin entre Rosecliff et Bella Rivière, afin d’être près de la famille d’Isobel. Diplômé du programme de gestion et d’exploitation d’entreprise agricole du Collège Macdonald, Molson fit aménager de vastes jardins derrière sa propriété.

En 1922, Molson acheta une ferme située de l’autre côté de la route, dans l’intention d’en faire une ferme modèle à but non lucratif. Il embaucha la famille Jutras pour gérer le domaine rural lorsqu’il était trop pris par d’autres affaires, telles la conception et la mise en place d’un système de canalisation pour la communauté et la construction de terrains de tennis pour pratiquer son sport préféré.

Photographie aux tons sépia d'une vaste maison (domaine de Kenneth Molson) entourée d'une clôture de fer avec portes; en avant-plan, on aperçoit deux jeunes enfants en costumes de matelots.

Les deux enfants de Kenneth Molson et Isobel Meredith, Kenneth Meredith Molson et Winnifred Molson, devant leur maison à Saint-Patrice, vers 1923.