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Les patient·e·s à l’Institut

Montage de deux images. En haut, photographie en noir et blanc du visage d’une une femme souriante. En bas, un morceau de carton usé avec des inscriptions imprimées et manuscrites. Il est écrit «Institut du radium de Montréal - Carte d’admission». Le champ «Nom» est rempli par «Mme. Édouard Bolduc» et le champ «Adresse» par «1462 Letourneux». La carte se termine par «S.V.P. - Conservez cette carte et apportez-là toujours à l’Institut».

(En haut) Photo de publicité de Mary Bolduc, 1932 (En bas) Carte d’admission de Madame Bolduc à l’Institut du radium, 1939

Mary Travers, dite La Bolduc, est sans doute la patiente la plus connue à être passée à l’Institut. Considérée comme l’une des premières autrice-compositrice-interprète du Québec, elle connaît un succès phénoménal durant la Grande Dépression (1929-1939) grâce à ses textes drôles et empreints d’espoir, de sa musique entraînante et de son célèbre turlutage. En 1937, à la suite d’un accident de voiture, on lui diagnostique un cancer. Après deux opérations infructueuses, elle est transférée à l’Institut du radium. C’est là qu’elle s’éteint, le 20 février 1941 à l’âge de 46 ans.

Photographie en noir et blanc représentant une salle meublée de lits d’hôpitaux et de chaise. Neuf hommes sont assis, la plupart ayant des bandages autour du cou ou du visage. Une petite statue à l’effigie de Jésus trône sur une étagère et un panneau sur lequel est écrit «Défense absolue de fumer» est installé sur le même mur.

Salle d’hospitalisation du Sacré-Cœur de l’Institut à Maisonneuve, 1943

Mis à part le passage de La Bolduc à l’Institut, les archives ont gardé très peu de traces des patient·e·s. Pourtant, ils et elles sont au cœur de son histoire. Nous savons que ces derniers étaient nombreux et souvent très pauvres. Selon les statistiques de l’Institut, la majorité des patient·e·s ne payaient pas pour leurs soins. Par exemple, entre 1929 et 1930, sur 11 424 traitements, 8 908 sont donnés gratuitement, soit près de 78%. En 1947, presque 20 ans plus tard, 70% des traitements sont toujours offerts gratuitement.

Écoutez le clip audio avec la transcription : Témoignage d’André Gravel, ancien patient

Photographie en noir et blanc d’une femme en habit de religieuse et d’un patient. Elle est debout derrière son patient qui est assis. Elle est en train de changer son pansement situé au niveau du cou et du bas du visage.

Sœur soignant un patient, 1949

Aujourd’hui, il peut nous sembler étrange que les traitements médicaux offerts par l’Institut n’aient pas tous été gratuits. Il faut savoir qu’avant les grandes réformes sociales des années 1960, les soins médicaux au Québec étaient payants pour la grande majorité de la population. Seuls les plus pauvres, qu’on appelait les indigent·e·s, voyaient leurs frais médicaux payés par l’État. En 1934, la Ville de Montréal et le Gouvernement provincial acceptent de donner respectivement 20 000$ et 50 000$ par année à l’Institut, à condition que 40% de ses lits soient réservés aux indigent·e·s.

Photographie en noir et blanc représentant une femme assise mettant sa main sur un oreiller placé sur un lit d’hôpital. Deux machines sont installées sur des supports autour d’elle. L’une est une tige de métal tenue à l’horizontale par dessus sa main et l’autre ressemble à une caméra dont on pointe l’objectif par dessus sa main.

Soins à la main d’une patiente, 1949

La majorité des patient·e·s de l’Institut proviennent de Montréal et plus largement du Québec. Toutefois, la réputation de l’hôpital dépasse les frontières de la province. Par exemple, en mai 1937, l’Institut reçoit une lettre d’une personne atteinte d’un cancer du sein à Haïti : « Cette malade […] est prête à franchir la distance et faire tous les sacrifices pourvu qu’elle guérisse. » Après une traversée éprouvante de cinq jours en bateau, elle arrive enfin à Maisonneuve. Son cas étant grave et très avancé, les traitements n’auront guère de succès. Elle succombera malheureusement à sa maladie.

Photographie en noir et blanc représentant une petite pièce sans fenêtre. Le sol est recouvert d’un vinyle à motif carrelage et les murs sont recouverts de papiers peints aux motifs botaniques. Un homme, le patient, est couché sur une sorte de chaise longue. Une femme en habit d’infirmière manipule des machines qui ressemblent à des tableaux sur pattes avec des boitiers noirs installés dessus.

Infirmière auprès d’un patient dans une salle de traitement, 1943

Il ne faudrait pas pour autant croire que les traitements au radium à l’Institut sont totalement inefficaces. Dans un mémoire adressé au ministère de la santé du Québec, Docteur Origène Dufresne explique qu’environ 30% des cas de cancer sont guéris grâce aux traitements au radium. Le docteur affirme que le taux de guérison des patient·e·s dépend surtout de la nature et de l’état d’avancement de leur maladie. Le dépistage précoce demeure encore aujourd’hui garant d’une plus grande chance de survie.

Photographie en noir et blanc représentant une salle meublée de lits d’hôpitaux et de chaise. Deux femmes sont assises et 7 autres sont couchées dans les lits. Deux petites statues à l’effigie de Marie, la mère de Jésus, trônent sur des étagères. Un petit crucifix est installé au-dessus d’elles.

Salle d’hospitalisation de la Sainte-Vierge de l’Institut à Maisonneuve, 1943

Plusieurs autres enjeux s’ajoutent aux défis scientifiques associés au développement des traitements du cancer. L’avancement des sciences ne dépend pas seulement de la capacité des scientifiques à résoudre les problèmes sur lesquels ils se penchent. Dans cette dernière section de l’exposition, vous découvrirez que l’histoire de l’Institut du radium a été traversée par des problèmes de locaux, de finance et de sécurité ainsi que de nombreux conflits humains.