Les rebelles emprisonnés

Trop souvent, l’histoire oublie le nom des gens ordinaires qui militent dans les mouvements politiques. Elle se souvient des dirigeants tels que William Lyon Mackenzie et Louis‑Joseph Papineau, mais elle mentionne rarement les militants, qu’ils s’appellent Willson, Doan, Reid ou Graham. De nombreux citoyens de Sharon choisirent de prendre part à la Rébellion, ce qui valut à beaucoup d’entre eux d’être emprisonnés. Deux Enfants de la paix perdirent la vie pendant la Rébellion : James Henderson et James Kavanagh. Alexander McLeod mourut après avoir été déporté dans la colonie pénitentiaire britannique de la terre de Van Diemen (aujourd’hui la Tasmanie). D’autres, comme Joseph Brammer et Enos Doan, quittèrent le Haut‑Canada pour les États-Unis.

Lettre envoyée par Mary Doan à son mari Charles pendant qu’il était en prison.

Pendant l’hiver de 1838, les rebelles et leurs sympathisants furent emprisonnés dans tout le Haut‑Canada, sans être inculpés et sans bénéficier de l’aide d’avocats. Ils durent attendre presque jusqu’en avril avant d’être traduits en justice, certains d’entre eux étant reconnus coupables de haute trahison. En avril, Samuel Lount et Peter Matthews furent pendus publiquement, et d’autres condamnations à mort furent commuées en déportation dans une colonie pénitentiaire britannique en Tasmanie. Les conditions d’emprisonnement étaient très dures, jusqu’à 53 hommes étant entassés dans une même salle. Il n’y avait pas de lits décents, peu de couvertures, et aucune intimité. On était au plus fort de l’hiver, et les hommes n’avaient rien d’autre à faire que de sculpter des bouts de bois de chauffage – ou de regarder entre les barreaux de la fenêtre les soldats qui construisaient l’échafaud. Au printemps de 1838, les détenus des prisons de Toronto et Kingston commencèrent à fabriquer des coffrets de la Rébellion. Ce travail artistique leur remontait le moral et leur permettait d’offrir du réconfort à leurs proches qui les attendaient chez eux.