Souvenirs de mummers
Photo gracieuseté de Mme Ann Whiffen et Mary Power
Elizabeth : On n’était pas encore couchés, il était assez tard quand ils arrivaient, sans doute 11 heures ou 11 heures et demie, et on les faisait entrer, 2 heures du matin, je regardais la pendule et Joey chantait « Blue Eyes Crying in the Rain ».
Mme Ann : In the rain, yeah [rires]
Elizabeth : C’était encore un aspect important des fêtes de Noël à cette époque, et c’était probablement en 1992 ou 1993. Après ça, quand les gens ont commencé à bouger plus et ce genre de chose, ça s’est perdu.
Mme Ann : Tout a changé si vite, vous savez…
Mary : On avait hâte au jour de Noël parce qu’alors, on pouvait faire les mummers deux fois. On y allait l’après-midi et puis encore le soir. C’était le seul jour de la période des fêtes où on était autorisés à le faire deux fois. On disait à maman qu’on devait changer de déguisement pour le soir, il fallait qu’on trouve un autre costume. Maman disait : « La seule chose à faire c’est que ce que tu portais aujourd’hui [pointant ses doigts en direction croisée], toi tu le mettes ce soir ». Parce que, où aurions-nous trouvé autre chose?
Mme Ann : Exactement, où aurions-nous trouvé autre chose?
Intervieweuse : Il n’y avait pas beaucoup de masques ou de choses comme ça?
Mary : Il n’y avait pas de masques. On faisait tout soi-même. On portait ce qu’on pouvait se mettre sur la tête, on faisait des trous pour les yeux. Et on ne pouvait certainement pas prendre une taie d’oreiller comme aujourd’hui et faire des trous dedans, on n’avait pas de taies d’oreiller à revendre. Alors si on mettait une taie d’oreiller, il fallait se débrouiller à la soulever un peu pour y voir.
Elizabeth : Et on la baissait quand on marchait dans la rue au cas où on croiserait quelqu’un, parce qu’il aurait pu voir votre visage si la taie n’était pas baissée.
Mary : Donc on la baissait et on marchait à l’aveuglette.
Mme Ann : C’était le bon temps, vous savez. On peut dire ce qu’on veut, c’était le bon temps.
Elizabeth : Tout se faisait de manière communautaire. Les gens se rassemblaient bien plus qu’aujourd’hui.
Mary : Oui, tout à fait. Et maintenant, c’est ce qu’on disait avant, les gens ne veulent pas de vous [les mummers] chez eux, surtout si vous arrivez avec [vos bottes] et on sait bien que les mummers ne retirent pas leurs bottes. Ils ne sont pas obligés.
Mme Ann : Ils ne doivent pas les retirer.
Elizabeth : Ça gâcherait la danse.
Mary : Je me rappelle, une année, c’était après Noël, maman a dit à papa : « Mon dieu, Thomas, il va falloir qu’on pense à mettre un tapis par terre, elle a dit, la peinture est partie ». Il a répondu : « Ça serait moins écaillé si tu ne laissais pas entrer autant de mummers pendant les fêtes ». Et c’est comme ça…
Elizabeth : Je dois avouer que j’ai dû en enlever un peu.
Mme Ann : Ce n’était pas qu’un peu, ma chère. Mais il était si content quand ils arrivaient tous.
Elizabeth : Tout le monde avait hâte, presque tout le monde.
Mme Ann : Mais il disait, quand ils étaient partis : « On s’est bien amusés, pas vrai? »
Mary : Tante Sis jouait de l’harmonica, n’est-ce pas?
Mme Ann : Tante Sis, oui. Elle savait tout faire et elle dansait, mon dieu!
Elizabeth : Et maman et Lorraine, je crois que c’est elles qui ont lancé la tradition des mummers en juillet.
Mme Ann : Oh, ta mère, elle savait s’amuser.
Mary : Pas vrai?
Elizabeth : Je crois que c’est elles qui ont lancé ça parce qu’à la fin des années 1970, vers 1976, 1977, je ne connais personne qui pensait faire Noël en juillet.
Mme Ann : Exactement.
Elizabeth : Mais Lorraine est rentrée de Labrador City et elle et maman, elles se sont dit : « Oh, ça serait bien si tu pouvais rentrer à Noël ». Mais il n’était jamais simple pour eux de rentrer à Noël. Alors, elle a dit : « Tu sais ce qu’on devrait faire? On devrait aller chez Mike Dicks ». Et Lorraine a répondu : « D’accord mais on devrait se déguiser ».
Mme Ann : Mon dieu!
Elizabeth : Et les deux se sont déguisées [en mummers] et elles sont arrivées par le chemin de derrière pour que les gens de Rushoon ne les voient pas. Elles sont arrivées chez Mike Dick par l’arrière, elles ont dansé un peu et tout le reste, puis elles sont allées chez Dick Bennett, là où vous [l’intervieweuse] habitez maintenant, et elles ont dansé, et puis chez Mabel, et chez Mabel, elles étaient exténuées parce qu’elles s’étaient tellement amusées chez Mabel qu’elles ne pouvaient pas aller plus loin.
Mary : Non, on ne pouvait pas aller plus loin après ça.
Elizabeth : Elles n’allaient pas plus loin que les quatre maisons qu’on pouvait atteindre par le chemin de derrière, jusque chez Hannah Emberly et puis retour à la maison. Parfois, elles apportaient leur propre bouteille et d’autres fois, elles prenaient un verre chez Mike Dicks.