Le Géant bipolaire, une légende vivante! – Première partie
Une légende Guillaume Beaulieu
Dans « quelques arpents de neige » du Nord, un géant pousse son rocher. Épais rocher de glace, poussé par 1000 tonnes de muscle que la volonté raidit. Le projet est clair : dégager la terre de ce froid masque blanc pour en faire un endroit vivable. Quitte à prendre 2000 ans. Avec la vitesse d’une tortue vieillissante, il fait des gains et le soleil fait bientôt cause commune avec lui, jusqu’à ce que le glacier se rétrécisse comme peau de chagrin. Les torrents d’eau douce qui serpentent la glace et finissent par toucher le sol, pulvérisent la pierre jusqu’à la fariner en une argile brun-gris. Le géant à la couenne dure a à peine le temps de mettre ses « bottes de pine » et essuyer son front, qu’il est vite inondé jusqu’à la taille d’une eau boueuse. Tant et si bien que «Jamais Dieu ne fit à aucun peuple, un aussi beau présent d’argile».
De la trempe des géants dont les Scandinaves ont fait grands cas, notre imposant personnage est jeune, fort et grand, mais souvent seul. Lancé sur la piste de ce projet par son père, habitant plus au sud, il va, sans se douter que ce travail ne fait pas que mettre à nu ce terrain de façon impudique, mais qu’il le modifie aussi considérablement. Ses pieds-massues sont si lourds qu’ils affaissent la croûte terrestre. Le glacier racle si profondément le relief qu’il râpe les montagnes. L’eau est si puissante et volumineuse qu’elle a non seulement recouvert tout le paysage jusqu’à la taille du géant, mais elle a aussi laissé, tout au fond de l’eau, des trésors d’eskers filtreurs à rendre envieux le ¾ des peuples de la terre.